O.DEGUI
Meyasse, un village-aarch des Aissaoua relevant de la commune d’Ouled Mimoun, à l’est du chef-lieu de la wilaya de Tlemcen, souffre du minimum vital. Dans cette bourgade où vivent plus de 1000 âmes, la précarité est le seul décor. C’est à croire que ce village n’est pas encore libéré du joug du colonialisme français. 60 ans après l’indépendance, ce hameau attend toujours de bénéficier, à l’instar de tous les autres villages, des commodités les plus élémentaires.
Pour rejoindre Meyasse à partir du chef-lieu communal de Ouled Mimoun, il n’y a guère de choix, il faut prendre la route desservant Marsat et Ferma, pour accéder les pentes prononcées dans une ascension comme seule alternative, inévitable. En compagnie d’un habitant dudit village et d’un autre villageois, et à bord d’une Peugeot 504, on entame ce voyage de 12 kilomètres, une distance que l’on peut parcourir en un quart d’heure, mais, là nous avons mis 35 longues minutes.
En sortant d’Ouled Mimoun, il faut bifurquer à droite au niveau du carrefour tout près d’un arrêt de bus, le chemin est jusque-là plus ou moins en bon état.
Plus on avance, il se rétrécie. Les abords sont jonchés de déchets et de détritus, c’est dire que l’environnement est le dernier des soucis dans cette région. La voiture commence déjà à ralentir à partir du lieu-dit Marsat, et la montée devient de plus en plus raide.
Les virages sont serrés et nombreux, où le conducteur est sommé de klaxonner avant d’amorcer un virage, de par l’étroitesse de la chaussée qui risque de provoquer une collision avec les véhicules venant en sens inverse. Ici, le décor est paradisiaque, la nature est généreuse. Les forêts de chênes, d’oliviers, mêlés aux broussailles, au milieu des collines et falaises offrant un décor féerique.
La première vitesse est imposée, la route devient subitement une piste rocailleuse. La voiture sautille sous les secousses et trouve des difficultés à rouler sur ce chemin creusé dans la roche dans les années 1930. Nous avons marqué un arrêt pour constater la dégradation et la dangerosité de ce chemin aux ravins vertigineux. A la moindre fausse manœuvre, le véhicule peut basculer au bas de la falaise, sans aucune chance de survie. De quoi donner des sueurs froides !
Dans ce village perdu au beau milieu de la montagne, il n’existe qu’une petite école primaire qui accueille environ 60 élèves, tous du village, les collégiens et les lycéens se rendent dans les établissements de la commune de Ouled Mimoun ou à Tlemcen
A trois km du village, une source naturelle jaillit de la roche, au milieu d’un décor pittoresque. Cette source alimentait autre fois la station hydroélectrique, qui produisait de l’électricité mais qui est, aujourd’hui, à l’arrêt. Cet endroit, où la fraîcheur est présente à longueur d’année, aurait pu être viabilisé pour attirer les touristes en quête de beauté, de calme et de nature vierge à l’état sauvage, mais, hélas, rien n’est fait. A quelques centaines de mètres de là on arrive au village après 35 minutes de route. Le constat est lamentable. On ne recense qu’un petit café maure et une épicerie des plus modestes. «Nous n’avons que ce café pour nous retrouver et passer nos longues journées creuses à jouer aux dominos et aux cartes», dira un jeune villageois. Un autre enchaînera dans le même ordre d’idée : «sous des cieux plus cléments, un village de 1000 habitants est automatiquement doté de toutes les commodités dont une maison de jeunes, une aire de jeux, un cybercafé et du reste. Chez nous et comme vous pouvez le constater, nous continuons de vivre comme au temps de l’ère coloniale. Ici, les bienfaits de l’indépendance ne sont pas encore passés. On nous a oubliés, pourtant cette région a été le bastion de la révolution et le refuge des combattants de l’ALN». Dans ce village perdu au beau milieu de la montagne, il n’existe qu’une petite école primaire qui accueille environ 60 élèves, tous du village. Les collégiens et les lycéens sont toujours obligés de rejoindre le chef-lieu de la commune à Ouled Mimoun ou la ville de Tlemcen pour poursuivre leur scolarité. Le ramassage scolaire est toujours perturbé, les véhicules de l’APC sont souvent en panne. Du coup, les adolescents sont sommés de prendre le transport privé. «Nos collégiens et lycéens poursuivent leur scolarité à Ouled Mioun ou à Tlemcen. Le ramassage scolaire n’est assuré qu’occasionnellement, car le bus est souvent en panne. Le transport coûte trop cher. Les élèves doivent payer 80 DA à l’aller et 100 DA au retour. Les écoliers issus de familles modestes font la moitié du chemin à pied, jusqu’au village voisin Marsat pour économiser 50 DA en aller et retour», dira un autre habitant du village. Pour ce qui est de la salle de soins, un simple local géré par un infirmier originaire du village, qui se trouve dans un état lamentable. Le local est délabré les fenêtres sont cassées et la conduite d’eau est vétuste. Les sédiments de calcaire sur les murs en disent long sur la vétusté de la salle. « Les moyens dont dispose l’infirmier sont rudimentaires (Alcool, pansements, compresses et produits de désinfection), et les soins prodigués sont élémentaires. « Les services de la santé peuvent au moins nous envoyer, de temps à autre, un médecin et un dentiste pour consulter les habitants », demandera un villageois. Concernant le côté culturel, un local a été construit par l’APC mais il n’a pas été équipé et aucun gardien n’y a été affecté. La dégradation et le vandalisme ont provoqué sa mise à mort.
Une salle de soins en piteux état, pas de bureau de poste ni d’antenne administrative,pénurie d’eau et un réseau d’assainissement vétuste
Ici, aucun bureau de poste ni antenne administrative ne sont disponibles, il faut toujours se rendre à Ouled Mimoun pour toute opération postale ou tout papier administratif. Dans ce village, la seule satisfaction vient du réseau électrique qui est presque généralisé. Il n’y a que les nouvelles habitations qui ne sont pas encore raccordées. Le réseau de l’AEP est vétuste et en acier. Le seul château d’eau, alimentant le village, est fissuré et de faible capacité nous précise-t-on. La distribution de l’eau est rationnée hiver comme été. Le PEHD n’a pas le droit de cité dans ce bourg. Lors des dernières intempéries, nous sommes restés isolés pendant plus de 15 jours. Personne n’a pu sortir du village. Pour nous chauffer, il fallait abattre des arbres. Les autorités sont donc interpellées pour faire démarrer le chantier de gaz naturel», réclame-t-on. Côté assainissement, c’est un désastre écologique. Le réseau, réalisé à la fin des années 2000 est devenu vétuste par la force du temps et du manque d’entretien. Les eaux usées coulent à ciel ouvert en plusieurs endroits. Dans ces lieux, l’air est irrespirable, les odeurs sont nauséabondes et la pestilence sévit. Les oliveraies sont menacées par une pollution certaine. L’entreprise engagée pour effectuer les travaux de réparation tarde à le faire. En conclusion, disons que force est de reconnaître que, dans ce village, les manques sont nombreux. Le quotidien des habitants est très difficile. D’ailleurs, les plus aisés optent pour l’exode. Les responsables compétents sont appelés à faire le nécessaire pour viabiliser davantage ce village de haute montagne.